Se donner la perspective nécessaire
Octobre 2024
Éditorial de Pierre-Alexandre Blouin
Quand on prend des vacances, c’est généralement pour se reposer, passer du temps de qualité avec ses proches, mais aussi pour partir à la découverte. Déformation professionnelle qui s’est ancrée au cours des 20 dernières années, chaque fois qu’une destination est identifiée, je place toujours quelques commerces alimentaires sur le trajet, quitte à en dévier un petit peu. Ça permet de découvrir des produits, de voir des stratégies différentes, mais surtout de me donner un recul salutaire par rapport à notre marché local.
Invariablement, l’arbre tend souvent à cacher la forêt.
Cet été, j’ai eu la chance d’arpenter plusieurs états du nord des États-Unis et le Canada d’ouest en est. Tout un road trip et beaucoup de paysages ! Ça a aussi été l’occasion de visiter des dizaines d’épiceries et de goûter pleins de délicieuses choses. Comment se compare-t-on en matière de magasins et d’opérations ? Pas mal, je dirais, bien qu’il faille faire attention au jeu des comparaisons puisqu’il ne faut pas oublier la différence dans la taille des marchés en présence. Avec près de 10 millions de consommateurs dans le grand Chicago, pour ne citer qu’un exemple, soit plus que la population
entière de la province du Québec, c’est normal que davantage de concepts spécifiques y émergent.
Vous verrez un petit résumé de ces escapades dans un dossier spécial en page 20, la suite dans d’autres
éditions à venir. Certains grands constats émergent de ce voyage. D’abord, dans tous les marchés, les grands joueurs physiques et virtuels sont très présents. Le plus intéressant réside pourtant ailleurs : la résilience d’opérateurs indépendants et de petits groupes capitalisent sur leur capacité d’adaptation et la constance au service de leurs clientèles.
Un autre grand constat, sans appel celui-là : tout le monde se réclame du « local ». Il faut se rendre à l’évidence : tous les peuples veulent manger ce qui a été cultivé et transformé avec grand soin, tout près, dans ses territoires. Avec mon nouveau chapeau de président du conseil d’administration d’Aliments du Québec, j’y ai aussi porté une attention particulière.
Est-ce que nos aliments québécois sont meilleurs ? Chauvin, je vais vous dire oui sans hésitation. En pleine saison des récoltes, c’est d’autant plus difficile de dire le contraire. Avec un peu plus d’objectivité professionnelle, je dois vous dire qu’on a une chance unique ici au Québec par rapport au reste de l’Amérique du Nord.
Au-delà de la qualité exceptionnelle de nos produits, le Québec dispose surtout d’un outil incomparable, aujourd’hui accessible dans tous les réseaux de commercialisation : Aliments du Québec. Il y a bien des politiques d’approvisionnement et des campagnes à différentes échelles un peu partout au Canada et aux États-Unis, mais aucune ne fédère autant d’entreprises ou ne rejoint autant de canaux de commercialisation.
Au détail, au resto, au CHSLD, à l’école, au boulot, sur le Web et sur les produits, le petit logo jaune trouve facilement son chemin jusque dans notre assiette. Certains le trouvent peut-être trop présent, je ne suis pas de cet avis. Au contraire, avec plus de 26 000 produits vérifiés par l’organisme et sa présence dans nos foyers depuis plus de 25 ans, il y a toujours du travail à faire.
Mon expérience du monde bioalimentaire m’a appris que nous devons demeurer innovants pour rester pertinents et concurrentiels, malgré une foule de facteurs hors de notre contrôle. Pour les prochaines années, nous devons viser encore plus loin. Nous devons consolider nos forces et fédérer tous les joueurs de l’industrie. Le rayonnement de la marque Aliments du Québec signifie que les consommateurs sont de plus en plus conscients de leurs choix. Ça signifie que les détaillants doivent redoubler d’efforts pour mettre en avant des produits québécois ; que nos transformateurs doivent veiller à sélectionner encore plus d’ingrédients québécois dans leurs produits ; que nos restaurateurs et nos institutions doivent bonifier leur carnet de commandes au profit de producteurs et d’entreprises d’ici. Et pour nos producteurs, ça signifie que tout l’écosystème les soutient.
En d’autres mots, l’avenir de notre industrie bioalimentaire repose sur l’unité et la collaboration. Nous avons tout à gagner en nous ralliant tous ensemble derrière une marque qui a fait ses preuves. C’est en adoptant cette marque collectivement que nous pourrons rayonner sur tous les marchés et montrer fièrement notre identité locale.