Retour sur l’élargissement annoncé de la consigne

Juin 2015

En mars dernier, le premier ministre Couillard justifiait la poursuite de l’équilibre budgétaire en ces termes : « tout discours de solidarité qui ne s’appuie pas sur un budget équilibré est une illusion ». Le dossier de l’élargissement annoncé de la consigne dégage, selon nous, la même illusion. Derrière des intentions nobles on échafaude des scénarios imaginaires qui ne tiennent malheureusement pas la route.

Au cours des dernières semaines, nous avons été témoins d’une série de fuites dans les médias, apparemment attribués à des employés du ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. Il a d’abord été question de la consignation des bouteilles de vin, puis des bouteilles d’eau et finalement de la quasi-totalité des contenants de boissons qui seraient, selon ces sources bienveillantes et bien informées, tous l’objet d’analyses sérieuses au Ministère. Pour étudier adéquatement une avenue, ne faudrait-il pas commencer par consulter les parties concernées ? À ce jour, l’ADA n’a jamais été rencontrée pour évaluer la faisabilité d’aucun de ces scénarios apparemment sur la table. Pourtant, il suffit de lire les articles sur le sujet et les commentaires des consommateurs : tous croient qu’il suffira du jour au lendemain de rapporter ces nouvelles consignes au point de vente.

Aucun plan d’affaires n’a été mis de l’avant, aucune information n’est disponible sur les coûts de ces initiatives pour les consommateurs, qui assumeraient les frais d’implantation et surtout qui défraieraient les frais d’exploitation récurrents de ces systèmes. Pour paraphraser le premier ministre Couillard, le seul budget équilibré disponible à ce jour, est celui qu’à réalisé la SAQ. Ce scénario d’investir 250 M$ sur 5 ans, bien que réaliste, nous apparaît plus démesuré qu’équilibré. Considérant que la collecte sélective dessert maintenant 99 % de la population québécoise, on est loin de la situation qui justifiait l’implantation d’une consigne publique en 1984.

Certains groupes ont toujours été favorables à la consigne, mais voilà que certains maires très loquaces se sont également saisis du dossier, réclamant des actions rapides et invoquant les coûts de gestion du verre dans les centres de tri municipaux. Avaient-ils oublié que 100 % des coûts nets de ces services sont actuellement compensés par les entreprises génératrices? Ces mêmes maires s’insurgent contre l’apparition de boîtes postales sur leur territoire, mais n’ont pas réfléchi à l’impact de centaines de centres de dépôt potentiels.

Suite à chaque ballon paru dans les médias, le ministre Heurtel a affirmé que son cabinet n’était pas à l’origine des fuites, qu’il n’avait pas arrêté sa décision sur la modernisation de la consigne et de la collecte sélective et que cette dernière se baserait sur les résultats des études en cours. Les détaillants en alimentation ne savent plus quoi penser, mais ils en ont assez d’être tenus à l’écart du processus d’élargissement apparemment très avancé d’une opération qui a déjà des impacts négatifs sur leurs opérations. Nous craignons également que l’évolution actuelle du dossier risque de nuire grandement à la récupération dans un contexte plus large. Bon nombre de consommateurs mettent maintenant en doute la pertinence de la bonne habitude qu’ils ont prise de déposer leurs matières recyclables dans leur bac de recyclage.

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